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mercredi 30 novembre 2011

Mon indignation

J'ai bien conscience que les quelques lignes qui suivent n'ont rien de très surprenant et ne servent à rien dans l'absolu, mais ça me fait plaisir. L'indignation court les rues comme une trainée de poudre qui ne demande qu'à être allumée, mais j'ai bien peur qu'aucune bombe n'explose car elle ne mène à rien à l'autre bout...
En ce qui concerne l'art, depuis la fin des années 80, un phénomène s'est accentué et a fait de lui un immense vivier spéculatif. L'oeuvre est plus que jamais un placement, une valeur qui ne cesse d'augmenter pour certains et de se dégrader pour d'autres. Alors, pour mettre plus de chances de son côté, l'artiste ne cherche plus à dire quoique ce soit et se contente d'un consensus global où plus rien ne dérape, ne critique, ne témoigne, ni ne met en avant une quelconque pensée personnelle. Le but est de se faire repérer par tel ou tel intermédiaire en cheville avec le système qui propulsera par ses moyens financiers ou politiques telle ou telle oeuvre sans fond. De là, le succès et la fortune seront assurées... On assiste à une profusion d'images gadget sans teneur, de sculptures grandiloquentes et autres productions spectaculaires et faussement mystérieuses. Au mieux, on a des oeuvres avec l'apparence du fond mais se contentant de la forme, lisse et glacée de la bonne société, où se reflète la figure heureuse de la béatitude lobotomisée.
Jeff Koons
 Le très intelligent documentaire de Ben Lewis "l'art s'explose" (article sur "le post") démontre bien la mécanique mafieuse mondialiste qui fabrique de toutes pièces des stars de l'art médiocre comme Philippe Pasqua, artiste de toute évidence arriviste et plagiaire au savoir faire rapide, prolifique et bien torché (trois qualités indispensables pour le marché de l'art). Incapable de prononcer une phrase intelligente et se servant à pleines poignées de tout ce qui se produit autour de lui, manipulant les citations plastiques pour se garantir une identité plastique identifiable facilement, il s'est assuré un niveau de vie plus que confortable en se frayant un chemin dans ce milieu de parrains par le vulgaire racoleur et les objets clinquants.

Philippe Pasqua
D'autres, après s'être retrouvés au sommet de l'olympe où résident ces faux dieux de l'excellence artistique, purs manipulateurs sans scrupules de la finance internationale, se sont hissés au même niveau en provoquant d'eux mêmes des bulles spéculatives, comme Damien Hirst. Artiste intelligent? attitude ironique? posture critique? même pas. Juste une personne avide, dépassée par l'ivresse de la fortune, manipulant les codes entre spectaculaire et répugnant.
Damien Hirst

Nombre d'artistes se constituent de véritables usines de production, embauchant une multitude de petites mains prêtes à "servir" le maître dans ses délires les plus fous, mais aussi les plus "bankable". Les oeuvres les plus clinquantes et les plus absurdes sortent d'ateliers où foisonnent les plans marketting en tous genres: on n'y produit pas de l'art, mais des objets ciblés sur une clientèle potentielle, allant jusqu'à fabriquer des produits dérivés comme on en trouve à Disneyland.
magnets Murakami

Le plus triste c'est que ce phénomène ne concerne pas uniquement les plus grands.. Bien au contraire, une foule de petits inconnus se ruent sur le moindre lieu d'exposition un peu reconnu pour fourguer des camelotes insondables! Tous les sujets sont bons, rien n'y est épargné. On trouve du tout et du n'importe quoi pourvu que ça ait l'air bien fait, avec une pointe de narcissisme à peine déguisé, un zeste d'autosuffisance, et une grosse louche de relations bien placées.  Chacun y va de son charme personnel, de poignées de mains entachées de petites magouilles financières, de subventions louches et de trafics d'influences en partenariat avec des élus friands de bulletins de vote...



site de vente en ligne "d'art contemporain"

Le résultat est affligeant. Tout le monde court derrière des prix de vente hallucinants où ne se reflète que la misère ou la pingrerie... Les prix sont au delà de tout jugement, la critique est inexistante. C'est un univers sauvage, fait de sites internet, de salles de vente aux enchères, de galeries privées ou associatives, où la spéculation est la plaque tournante d'une diffusion d'oeuvres aussi plates et insipides les unes que les autres.
Didier Argentero, artiste "numérique", titre: "le mouton"...
Alors oui, je suis certainement un illuminé qui espère encore bêtement qu'on regardera son travail pour ce qu'il est véritablement et pas pour sa valeur sonnante et trébuchante potentielle.. Mais voilà, dès qu'on ne se soumet pas à cet univers consensuel nauséabond, on devient très vite un paria, une personne à éviter. On tombe dans un anonymat sans fond où toutes les portes se ferment car à partir de moment où l'oeuvre propose un regard critique sur le monde, ou si ses sujets ne vont pas dans le sens général, personne n'en veut!
Où sont passées les années 70? Fortes de leurs utopies et de leurs cris de guerre!? Même les artistes de cette époque ont fini par céder et se sont retrouvés totalement assimilés par ce système qu'ils critiquaient.  L'artiste a toujours été assujetti au pouvoir, à l'idéologie dominante et à l'argent.  Nous auront connu un petit siècle de répit romantique nuancé d'anarchie et de révolte.. et c'est déjà fini. Bien plus qu'ailleurs, car dans la musique et le cinéma on trouve encore des révoltés, le plasticien est à nouveau le complice de la bêtise, de l'argent omnipotent, du pouvoir et de ses ornières.

mise à jour et suite en 2020:

 
 Bien que je reste assez d'accord avec le moi d'il y a 4 ans environ, j'ai surtout assimilé, intégré et digéré une vérité toute simple: l'art n'existe pas.

Je suis bêtement entré dans l'univers des beaux arts dans ma prime jeunesse (je prenais des cours du soir à 13 ans) comme un enfant qui se prépare au séminaire pour devenir prêtre... J'avais bien des choses à dire et persuadé qu'avec du talent et surtout beaucoup, beaucoup de travail, ON finirait par écouter JE... Mais je n'étais pas encore assez cultivé, ni mature, ni devin, pour me rendre compte qu'à ce moment-là je n'étais qu'un, parmi tant d'autres, sous-produit de la guerre froide; en tant qu'artiste de la "liberté" à tout prix, je ne faisais que servir les objectifs idéologiques du mondialisme qui n'allait pas tarder à reprendre les rennes de tout ce petit monde, vociférant à corps et à cri assaisonné d'un peu de tout et de n'importe quoi: au diable les Hans Haacke, les nouveaux expressionnistes, les body-artistes de tout poil, les NINA HAGEN, les "figurateuteurs" trop libres (pas ceux du marais!) et tout le "saint frusquin jeanYannesque" et ses blagues trop dérangeantes: à partir des années 90, l'art redevient pleinement ce qu'il a toujours été au fond (car il n'y a que de la forme quelque soit le "petit message" du bonhomme):

UN PRODUIT DE LUXE
POUR FLATTER LE NOMBRIL
DES PUISSANTS ET DES POSSéDANTS

AUX YEUX DES AUTRES
PUISSANTS ET DES POSSéDANTS

AUX YEUX DES AUTRES
PUISSANTS ET DES POSSéDANTS

AUX YEUX DES AUTRES
PUISSANTS ET DES POSSéDANTS..........

Un point c'est jamais fini!



NB: Maintenant je peins des oiseaux
et j'écris des contes pour mes futurs petits enfants, 

et j'ai parfaitement compris ce qui est arrivé aux artistes constructivistes qui sont restés en URSS et qui n'ont pas voulu émigrer aux USA sous la pression des galeristes capitalistes (euphémisme) de l'époque... et qui nous sont revenus en boomerang à la libération en 1945!
Mais en beaucoup plus chers!
Business is business..






mardi 13 septembre 2011

A propos d' Otto DIX

Autoportrait d'Otto DIX, peintre du début du XXème siècle



"La jeune fille et la mort"
J'aime particulièrement cette oeuvre d'Otto Dix. La jeune fille, ronde, voluptueuse, aux petits seins presque juvéniles,  le pubis gonflé, son sourire à la fois narquois et espiègle, est une véritable invitation à l'amour et au sexe. Elle ne regarde rien de particulier et tel Guignol dans son petit théâtre, ne devine pas ce qui arrive dans son dos: la mort, patiente, veille dans une posture d'écoute indiscrète. ses chairs sont brunes comme un cadavre en début de décomposition et la main levée, attend son heure. On ne voit jamais de "jeune homme et la mort", comme si la décrépitude ne menaçait que les femmes.. sans doute parce qu'elles sont encore le symbole absolue, du désir de toute chose avant de ne tout perdre en une seule et radicale fois. Mais j'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet...

triptyque de "la guerre" et sa prédèle
Ayant lui même été soldat durant la première guerre mondiale, Dix a beaucoup travaillé sur ses ressentis d'après guerre. Cette oeuvre est pour moi la plus belle vision du monde de l'horreur et de sa violence. Le tableau est rempli d'odeurs insoutenables, mélanges de poudre, de souffre, de sang, de boue, de chair en décomposition. Des vapeurs nauséabondes semblent sortir du sol, jusque vers un infini de glace désertique, pour s'engouffrer dans les pores de ceux qui sont encore en vie. La mort domine la composition, pointant du doigt le spectacle dont elle parait si fière. Mais elle même, tel un étendard abîmé et déchiré,  est abandonnée à son sort, pendouillant à l'extrémité d'une branche prête à céder sous ce qui lui reste de poids. Elle est aussi une victime comme celles, innombrables, qui sont aussi représentées dans d'autres tableaux (voir ci dessous). La composition, le choix du triptyque, les morts du dessus et celui de dessous, les vivants, hagards et robotisés, les lointains grisés, me rappellent ce fameux film des "croix de bois". Ce qui me pose aussi la question, en tant que peintre du XXIème siècle, n'ayant pas connu la guerre implicitement, mais constamment spectateur de ses atrocités par les media, comment pourrait-on encore concevoir une telle peinture aujourd'hui? Comment parler de l'horreur de manière authentique sans sombrer dans la sensiblerie sans conséquence? Comment parler des victimes de plus en plus nombreuses chaque jour pour couper court à l'indifférence?  Le peintre est-il encore un témoin de son temps?
Toutes ces questions me viennent chaque jour, là où l'artiste moyen contemporain n'a de cesse que de vendre sa marchandise, de se positionner sur un marché de l'art détenu par quelques- uns? Là où les lobbies de toutes sortes et de toutes couleurs politiques n'en finissent pas de s'en mettre plein les poches sur la misère du monde?




samedi 10 septembre 2011

Le regard de "La jeune fille à la perle"

"la jeune fille à la perle", par  Johannes Vermeer, peint vers 1665
Il n'y a rien d'original à apprécier ce fameux tableau. Pourtant, cette image me hante particulièrement et reste assez unique dans la peinture flamande. Je vous conseille d'ailleurs le très beau film de  Peter Webber, réalisé en 2003, qui relate une histoire d'amour platonique romancée et fictive entre le peintre et son modèle. Ce qui me point dans ce tableau, c'est le regard de la fille qui semble nous interpeler mais qui en réalité ne nous voit pas. Elle est concentrée sur quelque chose qui n'est pas nous, sans doute une autre personne. Elle observe un léger "à côté" en dehors du tableau qui nous dématérialise complètement. Un regard trop fixe aurait été vulgaire, interrogateur, inquisiteur, et le portrait n'aurait pas du tout été le même.

A ses yeux fait écho la perle: mini miroir à 360 degrés qui aurait pu refléter le monde extérieur. Cette perle nous indique la direction de la lumière et pointe surtout cet ailleurs que seule la jeune fille connait et qui nous est tout à fait étranger; mieux, nous en sommes exclu. Le bijou, simple, rond, sans détail d'orfèvrerie, reste accroché par magie dans un petit recoin vide de son cou que l'on aimerait caresser ou embrasser. Ce petit espace sombre de son anatomie en est d'autant plus mystérieux, fragile et érotique. Cette fille est à aimer, à prendre dans ses bras mais n'appartient à personne sinon au peintre lui même (d'où l'histoire d'amour).

Il forme aussi un triangle avec les yeux, donnant un sommet supplémentaire à cette figure qui nous permet de nous échapper de son regard: sans cette perle, elle nous hypnotiserait et nous posséderait dans une relation intime que refuse le peintre: elle est à lui, et pas à nous. la perle nous regarde aussi mais pour nous signifier la froideur de son aspect presque métallique, pour nous rappeler que le monde est chose matérielle, avec ses codes et ses hiérarchies sociales, et que le bonheur n'est pas accessible en ce monde. Outre son rôle plastique dans l'ensemble de la composition, la perle est à la jeune fille ce qu'une armure est au chevalier: un rempart de protection qui nous éjecte dans notre propre réalité et surtout pas dans la sienne.

Ce regard à la fois doux et énigmatique appelle à l'empathie, à partager son sentiment et son âme. Elle ne cherche pas à nous séduire (et c'est peut-être aussi cela qui est tant séduisant dans ce tableau), ni à nous questionner ou à chercher notre intervention. Mais sa douceur extrême convoque en moi tout ce que j'ai d'humanité et j'en oublie presque le monstrueux qui est en moi. Elle ne me regarde pas tout à fait, comme pour me dire que je suis autre chose que ce que je ne parais, et du coup, je m'en sens meilleur. Je me sens amoureux de cette femme, prêt à lui donner tout ce que j'ai et pourtant, ce n'est qu'un tableau et cette femme n'existera jamais que dans mon imaginaire: c'est bien une icône.

vendredi 9 septembre 2011

Lucian Freud et moi


 






Ce qui me touche particulièrement dans l'oeuvre de Lucian Freud, c'est sa capacité à rendre le réel dans une impression de silence où un drame latent semble être joué mais où, en même temps, rien ne se passe, comme si les êtres étaient à la fois vivants et empaillés.
L'acuité de son regard est absolument incroyable, bien au delà des hyperréalistes qui utilisaient la photographie, c'est sa seule capacité à observer le réel qui lui permet de rendre chaque détail sans que ces détails ne nuisent à l'ensemble. de plus près, tout semble ébauché et pourtant, tout est là!  Le jour où j'arriverai à cela n'est pas encore venu...






 Parfois, cette acuité visuelle confine au monstrueux car les corps deviennent plus réels que dans leur propre réalité: personne ne regarde aussi intensément ses propres congénères. ce qui produit un effet d'intimité, qui nous autorise à entrer dans l'espace même de chaque être humain, et à la fois, nous en éloigne par son imposante présence, presque envahissante.

Par contre, ce que je lui "reprocherais", c'est de finalement aboutir un résultat où les corps sont juste posés comme de la viande, sans vie personnelle, sans passé ni avenir, sans mémoire, sans identité propre sinon celle de l'épiderme. Les personnes sont rarement dans leur décor personnel, elles restent des accessoires de natures mortes. Mais quel est alors le rôle du peintre? Se doit-il de rentrer dans la réalité sous tous ses angles? Ou peut-il simplement rester en dehors, comme pour s'en préserver? j'aimerais en savoir plus sur cette grosse dame... mais le peintre a choisi de ne rien m'en dire sinon qu'elle est obèse. et cela, ne me convient pas vraiment. Mais c'est peut-être mieux ainsi? Mieux vaut ne pas trop en savoir en l'occurrence... nous en serions trop affectés.


jeudi 8 septembre 2011

Un aperçu de mon ancien travail

Avant,  je n'étais pas vivant et je ne peignais que des choses mortes..



"le torchon"  huile s/toile, 50x70 cm, 2011 
C'est un ami qui a posé pour moi, en faux cadavre sur le sol de sa cuisine, comme une de ces nombreuses victimes de meurtres et de violences que l'on retrouve ici et là sans que personne ne s'en soucie.



"faces cassées 1", huile s/toiles (40x40 cm chaque), 2011
Comme de nombreuses personnes dans le monde, ces gens sont morcelés, défigurés par accident ou intentionnellement. Elles ont perdu le droit à l'identité iconographique, identité que je leur rend ici au delà des faces cachées de leur personnalité réelle.